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OLYMPISME | Jacques Chirac

OLYMPISME

OLYMPISME

Diner avec la Commission d’Evaluation du CIO.

Une salade d’oranges au dessert, du raisin et des kiwis. Je n’ai rien dit, mais je suis sûr qu’ils l’ont fait exprès. Mon blog commence à tourner un peu partout dans les hautes sphères, et des références s’installent. Ceci dit, si je n’ai qu’à poster par le menu mes plats préférés dans mon journal pour me les faire servir en dîner officiel, j’aurais tort de me priver. Ca fait un moment par exemple que je n’ai plus mangé de taboulé oriental, de salade niçoise, de homard mayonnaise, de faisan farci aux cèpes, de pintade au chou, de cailles rôties, de tarte aux myrtilles, de pastèque, de clafoutis aux cerises, de mousse au chocolat et de kouign amann. Encore que l’on pourra se dispenser du kouign amann. Ce n’est pas mauvais ( si on aime manger une plaque de beurre avec du sucre ), mais c’est très lourd à digérer. Il vaut mieux ne pas avoir de choses importantes à faire derrière, comme par exemple diriger la France.

Le dîner s’est par contre dans l’ensemble très bien déroulé, en dehors de deux petits détails. Pour commencer, j’étais assis en face d’un gros monsieur chauve qui faisait des cochonneries avec sa soupe. Il nous a raconté des anecdotes piquantes sur ses visites faites aux différentes villes qui se proposaient pour accueillir des jeux olympiques, d’été ou d’hiver. A Nagano, par exemple, un de ses collègues s’est cassé la figure sur une patinoire et il a été blessé par une jeune fille qui lui a tranché un doigt avec un de ses patins. Elle allait trop vite pour s’arrêter alors qu’il s’étalait devant elle. Tout les membres du Comité présents à la patinoire ce jour-là ont eu peur pour le malheureux mais, à en croire le narrateur, la victime a pris la chose avec bonhommie. Il riait comme un bossu. On a su ensuite qu’il n’avait en fait absolument rien senti : il était ivre mort, totalement rond et pensait qu’il avait juste chuté de manière un peu cocasse. Il disait aussi d’un ton grivois et réjoui que la patineuse avait de bien jolies jambes.
Après, le gros monsieur chauve nous a abreuvé de détails peu râgoutants sur le doigt coupé, mais je n’ai volontairement pas écouté, je suis très sensible quand je suis à table. En tout cas, mes voisins trouvaient ça bien rigolo.

Ensuite, j’ai un peu essayé de discuter avec Lamour qui était assis pas loin, mais il n’entendait rien de ce que je lui disais, à cause du rire du gros monsieur et du bruit ignoble qu’il faisait en aspirant son potage. Je lui ai demandé : ” Alors, Jean-François, estimez-vous que la visite du Stade de France a pu avoir un impact bénéfique sur la décision finale ? “. Il m’a regardé avec des yeux ronds, a agité les mains de manière à me faire comprendre qu’il n’entendait rien et quand je lui ai répété un peu plus fort, il m’a répondu : ” Ah oui oui ! Je l’ai lu, votre internet-blog, il est très sympathique “. Et il m’a fait un grand sourire niais, les dents pleines de petits bouts de tomates de la soupe.

En dehors de ça, tout était très bien. Le discours que j’ai prononcé a été bien accueilli ( finalement j’ai trouvé le courage de le faire, hier, et je n’en suis d’ailleurs pas mécontent ), le repas était gai et la Comission d’Evaluation nous a confié avoir trouvé Paris tout à fait apte à accueillir les Jeux. Il parait que Londres aussi est un candidat sérieux. Mais visiblement, ils ne sont pas tous d’accord sur sa capacité à bien mettre en valeur le tir à l’arc. Si on avait su pour cette histoire de tir à l’arc, on aurait pu coiffer les anglais au poteau dès aujourd’hui, mais je crois que chez nous non plus ça n’est pas reluisant, pour le tir à l’arc. Si jamais les russes ont vent de cette histoire de tir à l’arc, ils vont mettre le paquet dessus, ils vont nous rafler le machin sous le nez et on aura l’air bien bêtes avec nos pin’s, nos casquettes et nos t-shirts Paris 2012.

Et puis tout le monde est parti. Il y a eu des saluts, des poignées de main, et des photos. J’ai d’ailleurs surpris la conversation de deux photographes, de manière tout à fait fortuite. Dialogue qui m’a conduit à repenser à cette affaire de livre d’histoire de CM2.

Le premier photographe proposait au second de le raccompagner chez lui :

” Viens, disait-il, je te prends dans ma voiture, on passe par la voie Pompidou, et je te dépose à la Bibliothèque Mitterand en même pas 20 minutes “.
Je ne sais pas si l’autre a accepté. Tout ce que je sais, c’est que je suis dans les livres d’histoires, mais que je n’ai aucun monument parisien, aucune voie, aucun quai, aucune station de métro à mon nom. Métro Chirac, ça ne sonne pourtant pas si mal que ça, ou en tout cas, ce n’est pas plus ridicule que Métro Corentin Cariou ou Métro Pré Saint-Gervais. Eh bien non. Il y a une place Charles de Gaulle, un centre Pompidou, une voie Pompidou, un Quai Mitterrand et une Bibliothèque Mitterrand, mais Chirac, rien. Oh, bien sûr, Giscard non plus n’a rien, mais il est académicien, maintenant, c’est aussi une forme d’immortalité. Alain Poher non plus n’a rien, mais ce n’est pas un vrai président, et puis il a certainement une ruelle à son nom dans un bled quelconque.
Je m’en suis ouvert à Delanoë, qui n’était pas encore parti. Il cherchait son parapluie au vestiaire. Il m’a répondu : ” Monsieur le Président, ce genre d’hommage se fait en général à titre posthume “. Il a raison, le bougre. Je pourrais bien mégoter pour obtenir un hommage à titre pré-posthume, mais ça serait un peu voyant.

J’ai reçu depuis l’ouverture de ce blog un abondant courrier de la part de mes administrateurs, qui me livrent quelques-uns de vos commentaires. Malheureusement, n’étant pas un familier de l’informatique et encore moins d’internet, je ne vais pas encore les lire moi-même, mais ils ont promis de me montrer le fonctionnement de la chose. Quoiqu’il en soit, je vous remercie tous de vos encouragements, et vous promet d’essayer d’écrire en ces lieux le plus régulièrement possible. Ce week-end je pars à la campagne, mais je penserai à vous.
Lol, comme on dit chez vous, et bonne fin de semaine à tous.

Jacques

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